#2389

Astar Mara. Cette nuit j’ai fait des rêves de courants océaniques, de routes liquides entre de hautes collines d’émeraude végétal, moussues et mystérieuses. Et il m’en est resté ces mots, « Astar Mara », me tournant sottement en tête au réveil. Il s’agit d’un terme du gaélique qui désigne les voies de circulation maritimes. Je l’ai retrouvé l’autre soir en relisant des passages de The Old Ways de Robert McFarlane, son si ample et si fascinant récit de longs voyages entrepris sur les sentiers ancestraux de l’archipel britannique. Astar Mara, le mystère de ces chemins que l’habitude et les conditions locales permettaient de tracer sur les portulans et de baliser dans les chants, ces passages sur l’océan d’île en île ou d’archipel à continent, forgés de traditions, de conventions et de coordonnées, alors que rien n’imprime l’eau, que tout s’y efface immédiatement.

#2388

Nature urbaine : non loin de chez moi, face à la caserne Nansouty, se tient une grande maison abandonnée. Un gigantesque tilleul assombri tout le petit jardin de sa masse et des branches dominent le trottoir. L’autre matin, passant par là, la senteur doucement miellée me fit penser qu’il y avait matière à une petite récolte… Je viens de m’y livrer, les mains levées vers le miel vert, et j’ai rapporté une satisfaisante brassée de ces fleurs pâles et odorantes. De quoi tisaner un peu à l’automne.

#2387

Là-haut, sous le toit, la pluie est ma musique. Piano et percussions. Je lisais l’autre jour, dans un essai sur la pluie, que contrairement à la manière dont il est traditionnel de l’illustrer, les gouttes d’une averse ne tombent pas comme d’un robinet avec un corps lourd et une tête pointue mais à l’inverse, tête arrondie en parachute et corps filant en pointe. Et je me demandais, combien il y a-t-il de noms pour les différents états de la pluie, dans la langue française ? Rincée, ondée, bruine, averse, pissée de chat, drache, abattée, abat d’eau, grain, saucée, berlée, guilée, crachin… Sans oublier le fait de pleuviner et celui de dégoutteler…

#2386

À entendre le merle, que le temps pluvieux rend particulièrement volubile aujourd’hui, je me souviens qu’étant enfant je m’étais un matin, en me réveillant, demandé si les oiseaux que j’entendais existaient ailleurs. Notre maison en Bretagne représentait pour moi un tel paradis qu’il me semblait que chaque élément de son environnement devait être unique : sûrement il n’existait pas d’arbousier ailleurs? Les petites fleurs jaunes et noires poussant dans le terrain sablonneux n’existaient que là, bien sûr (hélianthème à goutte, vois-je sur le web). Les oiseaux ici ne chantaient que pour nous.

#2385

Retour TGV. Il y a quelque chose de fascinant dans l’immensité plate de ce paysage, ces champs jusqu’à perte de vue au bout d’un horizon opalescent, juste la fumée des nuages gris en étages infinis au-dessus d’une telle plaine, avec çà et là simplement la rondeur d’une bosquet, l’ourlet d’une suite d’arbres au bord d’un chemin invisible ou le phare incongru d’un château d’eau.